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November 22, 2024
OPINION

Sa Majesté Kemdeng Donfack Joseph Cédric prend le pouvoir à 23 ans

  • mai 12, 2018
  • 7 min read
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Sa Majesté Kemdeng Donfack Joseph Cédric prend le pouvoir à 23 ans

 

Le 17 février 2018, à Fontsa-Touala, village de l’ouest du Cameroun, le nouveau roi du village est officiellement sorti lors d’une cérémonie colorée. Des milliers de personnes ont assisté à cette intronisation. Ils se sont réjouis de voir leur nouveau roi: Sa Majesté Kemdeng Donfack Joseph Cédric.
Bien qu’il soit encore relativement jeune, à l’âge de 23 ans, le charisme qu’il a montré lors de la cérémonie du 17 février 2018, a produit un grand impact sur le public. En outre, la profondeur de sa pensée, les projets de développement, et l’engagement pour la justice qui ressortent du discours qu’il a prononcé, ont convaincu la population que le nouveau roi travaillera pour le bien-être général du village.

«Nous ne devenons pas roi, nous sommes nés roi!»
Une croyance populaire bamiléké dit: «Nous ne devenons pas roi, nous sommes nés roi!» Longtemps après la fin de la cérémonie et tard dans la nuit, les gens n’arrêtaient pas de répéter cette phrase, l’appliquant à Sa Majesté Kemdeng Donfack Joseph Cédric: jusque tard dans la nuit, l’on commentait encore son premier discours. Avec ce discours optimiste, d’un jeune roi, ils ont compris qu’ils ont un grand roi, un vrai chef qui les unira pour le progrès du village.

Des signes particuliers montrent la naissance d’un roi
Une croyance Bamiléké veut que des faits exceptionnels se produisent le jour de naissance d’un roi. Ils signalent l’arrivée de l’extraordinaire bébé.
Les Bamiléké donnent des exemples de ces signes : un bananier qu’on plante et qui le même jour pousse et produit des bananes; un grand arbre qui s’assèche instantanément, même en saison des pluies; ou une catastrophe qui ravage récoltes ou habitations.
Le jour de naissance de Sa Majesté Kemdeng Cedric, une tornade a emporté le toit des maisons du palais royal de Fontsa-Touala. Un signe puissant pour un puissant roi. Vingt-trois ans plus tard, le 17 février 2018, il monta sur le trône.

«Un signe puissant pour un puissant roi»
Dans la tradition Bamiléké, la mort d’un roi ouvre une nouvelle page d’histoire. Elle déclenche une cascade d’importants événements pour la vie de la communauté. Il y a: l’annonce de la mort du roi, puis les funérailles officielles au cours desquelles l’on arrête le nouveau roi, et le précipitent, immédiatement, dans la La’Kam.
Il y réside plusieurs mois, confiné, ne recevant personne à part d’autres rois ou des notables hautement initiés, et probablement des femmes choisies. Ces rois et notables accomplissent des rites et administrent une formation traditionnelle que le nouveau roi doit suivre, avec succès, sinon il ne serait pas roi.
Finalement, le Roi sort du La’Kam en deux étapes: traditionnellement, dans un cercle relativement restreint; puis officiellement, lors d’une cérémonie publique à laquelle tout le village assiste.

Annonce de la mort du roi
Ici, il faut signaler que, à la mort du roi, personne dans le village n’a le droit de pleurer. Cette restriction peut parfois durer entre un mois à neuf semaines. Jusqu’au jour où le roi d’un village allié vient annoncer la mort et ouvre solennellement les lamentations. Des coups de fusil en l’air et des coups de bélier, signalent cette annonce.
Après une période bien définie de deuil, vient le jour des funérailles officielles. Le préfet du département préside celles-ci au cours desquelles le roi allié arrête le nouveau roi.
C’est ce qui s’est passé à Fontsa-Touala le 28 octobre 2017, lorsque Sa Majesté Yves Djombissie Kamga, roi de Fodjomekwet, a arrêté Kemdeng Donfack Joseph Cédric, le nouveau roi de Fontsa-Touala.

«Arrestation» du nouveau roi
Arrêter le nouveau roi est une étape cruciale dans le processus d’intronisation. La population du village, tous les curieux, les médias et les télévisions sont positionnés pour ne pas manquer une seule seconde de ce moment crucial. Au milieu de l’esplanade du village, tous les enfants du roi défunt s’alignaient pendant que la marche funèbre tourne en rond et danse en les encerclant.
Parmi les marcheurs et danseurs, le roi allié chargé d’arrêter le nouveau roi. Les notables locaux sont là aussi, prêts à aider le roi allié dans sa tâche, au cas où celui qui est arrêté voudrait s’enfuir.
On observe qu’en général, les princes Bamiléke ne sont pas tous chauds pour succéder à leur roi-père. L’inquiétude se lit sur le visage de ceux-ci alors qui se tiennent tranquilles pendant que les marcheurs-danseurs tournoient autour d’eux, prêts à tout instant à se jeter sur l’un d’eux comme un prédateur qui attrape sa proie. Le suspense monte.
Une forte pression pèse sur le corps et l’esprit des princes, chacun d’eux espérant que ce ne sera pas lui la proie.
La danse et la musique continuent. Tout le village est là, observant. Chacun retient son souffle. Le roi allié et les notables continuent eux aussi de danser, de marcher comme si aucun d’eux ne savait qui sera le nouveau roi.
Soudain, le roi allié et les notables se précipitent sur l’un des princes et le saisissent brutalement. Voilà le nouveau roi ! La foule crie alors que les notables portent le nouveau roi, manu militari, au La’kam.

Le mystère du La’Kam
La’Kam ou Laakam est l’endroit sacré de tout village bamiléké. Généralement il est situé dans la forêt, La’kam est l’endroit où tout futur roi bamiléké doit séjourner pour l’entraînement, les rites et l’initiation avant de s’asseoir sur le trône. Il y vit seul, confiné, coupé du monde ordinaire et visible. Seuls les notables hautement initiés et quelques autres rois, et des femmes triées, sont autorisés à venir le voir. Ce sont ces rois et notables qui accomplissent les rites et l’initiation.
On dit que ces rites et initiations, pratiqués en secret, fournissent au futur roi les pouvoirs surnaturels dont il a besoin pour accomplir son devoir royal. Ils sont également censés le protéger contre les mauvais esprits qui peuvent l’attaquer ou attaquer son village.
Les anciens ajoutent qu’autrefois, le roi restait à La’kam où il recevait les femmes qu’il avait l’obligation d’engrosser faute de quoi, il ne sortait pas du La’kam.Quand le futur roi réussit toutes les étapes d’initiation au La’kam, les notables le jugent apte au travail de roi. Ils le libèrent. Il peut maintenant sortir du La’kam.
C’est ce qui est arrivé à Sa Majesté le Roi Kemdeng Donfack Joseph Cédric, à Fontsa-Touala, le 17 février 2018. La sortie du roi de La’kam est l’occasion d’une cérémonie majestueuse à laquelle tout le village assiste. C’est un grand jour de joie, une fête populaire, une continuité triomphale des traditions, du royaume et du village.

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Hommes d'Afrique Magazine

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