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March 19, 2024
DOSSIER

QUELLES RETOMBÉES POUR L’AFRIQUE ?

  • janvier 17, 2014
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QUELLES RETOMBÉES POUR L’AFRIQUE ?

Quelles étaient Les Revendications Essentielles Des Africains A L’ouverture De La Neuvième Conférence Ministérielle De L’OMC A Bali Du 3 Au 7 Décembre? A La Clôture De Celle-ci, Il apparaît Clairement Que Ces Revendications Préoccupent Très Peu Les Décideurs Du Monde

Si pour tous les observateurs avertis des questions commerciales, l’Organisation Mondiale du Commerce jouait son avenir à Bali entre le 3 et le 7 décembre 2013, force est de constater que le continent africain, à la traine dans les échanges mondiaux, y plaçait également de grands espoirs.

Pour les Africains, une série de mesures devaient être adoptées à Bali pour sortir leur continent du sous-développement. Un an avant la rencontre de Bali, en 2012, les Africains ont désigné le Marocain Omar Hilal pour coordonner le Groupe africain à l’OMC. C’est donc lui qui a conduit les négociations pour le compte du continent. Dès son arrivée à Bali, Omar Hilal Interrogé par Med1, une radio marocaine, a déclaré que l’Afrique focalisera ses revendications sur trois questions cruciales:« l’agriculture, la facilitation des échanges commerciaux pour alléger la bureaucratie afin de permettre une fluidité du commerce international et les questions liées au développement comme les mécanismes de surveillance et les facilités accordées aux pays les moins avancés (PMA) ».

Tenue le 25 Octobre 2013 à Addis-Abeba, la Conférence des Ministres du Commerce de l’Union Africaine avait précisé la position du continent: « Nous demandons instamment à la neuvième Conférence ministérielle de réaffirmer l’engagement à l’égard d’une plus grande intégration des PMA dans le système commercial multilatéral et de prendre toutes les dispositions possibles en vue de la réalisation de cet engagement conformément aux mandats respectifs concernant les questions relatives aux PMA ».

A propos de l’Agriculture et notamment du coton, les Africains ont aussi demandé à titre intérimaire « l’adoption à Bali d’une décision sur la question du coton, sur la base des propositions faites par le C-4 au nom des pays africains producteurs et exportateurs de coton” Quant à la facilitation des échanges, ils ont appelé à la signature « d’un accord intrinsèquement équilibré, offrant aux pays en développement et aux PMA une marge de manœuvre et de flexibilité leur permettant d’adopter et de mettre en œuvre des engagements proportionnés à leur capacité à cet égard », tout en soulignant de nouveau que « Bali devrait se traduire par des résultats concrets dans les domaines de l’agriculture et du développement ».

L’Afrique devra encore se battre…

Mais avant même que ces revendications n’arrivent à Bali, il a fallu les exposer et les discuter à Genève. Dès

«Nous demandons instamment à la neuvième Conférence ministérielle de réaffirmer l’engagement à l’égard d’une plus grande intégration des PMA dans le système commercial multilatéral

ce niveau préliminaire, les Africains se sont heurtés à des complications, ce qui laissait prévoir les nombreux obstacles qui les attendaient à Bali et qui les empêcheront d’obtenir la satisfaction de leurs revendications. Faisant bon cœur contre mauvaise fortune, Omar Hilal déclarera, le 3 décembre 2013 en Indonésie : « On est dans le commerce multilatéral. Il y a ce qu’on veut et ce qu’on peut ». Parlant du paquet de décisions dont la conférence ministérielle de Bali allait discuter, il a néanmoins reconnu que « Ce package répond à beaucoup de nos attentes au regard des négociations difficiles faites à Genève. Nous sommes venus à Bali pour adopter cela et non venus en tourisme ».

En vérité, les grandes puissances ont amené les pays en voie de développement à se contenter de ces trois sujets conclus à Genève . Et même avec ce package revu à la baisse (10% du projet initial), les discussions furent houleuses. Au final, et en dépit du volontarisme affiché par le négociateur en chef du Groupe africain, l’Afrique s’en est sortie avec une portion congrue.

Pour ne pas dire avec rien dans son escarcelle. Les attentes de l’Afrique ont été reléguées aux calendes grecques. L’Organisation Mondiale du Commerce a pour cela, utilisé la stratégie du « Low hanging fruits » (les fruits du bas de l’arbre peuvent être cueillis facilement) , qui veut qu’on expurge les sujets épineux lors de négociations tenaces. De maigres sujets de consolation En surface, le premier accord commercial mondial conclu depuis 1994, devrait permettre aux pays les moins avancés d’avoir un large accès aux marchés des pays développés, comme le mentionne le « Paquet de Bali ».sur la facilitation des échanges, les pays africains et leurs Petites et Moyennes Entreprises pourront bénéficier de la diminution des frais douaniers, si les pays consentent à appliquer cet aspect de l’accord.

Pour l’Agriculture, l’Afrique peut se satisfaire de la déclaration sur la concurrence à l’exportation et des recommandations sur davantage de transparence sur les questions du commerce du coton. Le point 10 de la déclaration sur le coton achève de convaincre sur la duplicité des pays développés, dont le point de vue a primé lors de la rédaction de cette déclaration. « Nous invitons les PMA à continuer à identifier leurs besoins liés au secteur du coton ou aux secteurs connexes (…) Nous prions instamment les partenaires de développe- ment d’accorder une attention spéciale à ces besoins », stipule-t-il. Comment peut-on continuer à faire comme si ces besoins n’étaient pas identifiés ? A ce jour, les soi-disant “partenaires de développement” n’ont accordé aucune attention aux besoins de l’Afrique. Pourquoi commenceraient-ils à le faire après cette déclaration ? Pour le Professeur Emmanuel Moubitang de l’université de Yaoundé II au Cameroun, l’Afrique a de nouveau été flouée à la Conférence de Bali.

« Il est donc très clair que le Chapitre «Facilitation du commer- ce» conduira des pays en difficulté à mobiliser des moyens pour faciliter essentiellement des importations sur leur territoire, au plus grand profit des entreprises exportatrices mondiales », dénonce-t-il. Par ailleurs, il ajoute: « Si l’OMC annonce qu’elle apportera une aide financière aux pays les plus pauvres, on peut cependant se demander s’il s’agit véritablement d’un bon accord pour eux dans la mesure où ils seront dépendants de financements extérieurs qu’ils ne peuvent pas maîtriser pour le développement d’une activité qui ne sera pas à leur profit ». Sur l’agriculture, l’universitaire camerounais constate que « Les questions touchant les subventions et le dumping ont été effectivement mises sur la touche ». Le 16 décembre 2013 à Dakar, à l’ouverture de l’atelier de restitution des résultats de la 9ième conférence ministérielle de l’OMC à Bali, Alioune Sarr, Ministre sénégalais du Commerce, de l’Entrepreneuriat et du Secteur Informel s’est montré assez déçu car « les questions importantes restent en suspens, notamment la réduction des tarifs des produits agricoles et industriels par les pays développés et les pays émergents, la mise en œuvre effective du paquet PMA, le dossier coton, etc. ». Le Réseau Africain sur le Commerce a également fustigé la Déclaration de Doha. Dès le 7 décembre, lende-

 Sur l’agriculture, l’universitaire camerounais constate que « Les questions touchant les subventions et le dumping ont été effectivement mises sur la touche »

main de la clôture de la conférence de Doha, ce réseau a dénoncé cette conférence, dans un communiqué publié sur le site du Centre Africain pour le Commerce, l’Intégration et le développement: « Quelles que soient les attentes des pays africains ayant participé à la conférence de Bali, ils repartent presque bredouilles. Il n’y a pratiquement rien de substantiel dans le récent Paquet de Bali qui prend en compte les impératifs de développement de l’Afrique ».

Même hors d’Afrique, le « Paquet de Bali » est attaqué

Pour l’universitaire belge Arnaud Zacharie, Secrétaire général du Centre National de Coopération au Développement(CNCD), « Le texte convenu sur la facilitation du commerce est le contraire même de ce dont ont besoin les pays africains pour relever les défis fondamentaux et particuliers liés à la circulation des biens et services à travers les frontières nationales ».

Directeur de l’ONG IBON, l’activiste philippin Antonio Tujan est très dur contre la Déclaration de Bali: «Bali signifie en fait davantage de misère et de problèmes pour le peuple et pour la planète ». Donc pour l’Afrique. Parce que pour lui, justement, les revendications de l’Afrique sont implicitement rejetées par des dispositions contenues dans le « Paquet de Bali ». Selon lui, la décision de Bali « casse le droit à l’alimentation, parce qu’il instaure des limites aux subsides pour les céréales que les pays en développement accordent afin de pouvoir assurer leurs programmes alimentaires ».

Il prédit qu’à cause du « Paquet de Bali », les pays en voie de développement, notamment ceux du continent africain, subiront un afflux massif des produits et services des grandes puissances. Le texte de Bali relègue, en effet à la saint glinglin, l’impérieuse discussion sur les exportations dans la mesure où il ne mentionne vaguement que « la concurrence à l’exportation reste une priorité pour le programme de travail post-Bali ». En attendant, la réaction du CAMOT (Ministres en charge du Commerce de l’Union Africaine), l’Afrique devra encore batailler dans les négociations post- Bali.

Curieusement, pendant que le continent fait grise mine parce que ses revendications principales n’ont pas été satisfaites, les pays de l’occident, la France, notamment, se réjouissent. En conseil des ministres, le 11 décembre 2013, dans sa communication rendant compte des  négociations de Bali, le gouvernement Ayrault ne pouvait pas être aussi triomphaliste qu’explicite : « En ce qui concerne les dispositions agricoles du « paquet » de Bali, les intérêts des producteurs français ont été préservés.

Une déclaration sur la concurrence à l’exportation a été adoptée, mais elle n’a pas de caractère contraignant, et vise, conformément à la position européenne, toutes les formes de soutien public à l’exportation, notamment celles utilisées par les concurrents de la France. Nos « lignes rouges » ont été respectées ». En définitive, le « Paquet de Bali » qui est un succès pour l’OMC en tant qu’organisation ne doit pas faire oublier que pour le continent africain, il a encore du chemin à faire pour faire aboutir ses revendications.

Valery Foungbé

L’OMC AU CŒUR DU COMMERCE MONDIAL

L’organisation mondiale du commerce (OMC) est la seule organisation internationale a régler les relations commerciales des états au niveau mondial. elle constitue la clef de voute légale et institutionnelle du système commercial multilatéral.

Elle a vu le jour le 1er janvier 1995. Avant, il existait uniquement des règles multilatérales régissant les échanges de marchandises sur la base d’un accord «provisoire», l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT 1947). Celui-ci a été incorporé à l’OMC lors de sa création. Il est désigné par l’appellation GATT 1994 pour signaler qu’il s’agit d’un accord différent du GATT 1947 sur le plan légal, et qu’il le remplace. L’OMC gère et sur- veille une trentaine d’accords multilatéraux et deux accords plurilatéraux (c’est-à-dire des accords non contraignants, s’appliquant uniquement aux signataires en matière de marchés publics et de commerce d’aéronefs civils). Les règles régissant le commerce mondial ont donc obtenu un champ d’application nettement élargi sous l’égide de l’OMC. Les accords visent la libéralisation progressive des échanges internationaux, qui se négocie dans le cadre des cycles de négociations.

L’OMC est par ailleurs une enceinte de négociations multilatérales pour développer les relations économiques. Les principaux acteurs de l’OMC sont les Membres eux-mêmes. Leurs gouvernements sont tous égaux au sein des organes suprêmes, des divers comités et des groupes de travail de l’OMC. Toutes les décisions importantes sont négociées entre les membres, dans des conditions aussi transparentes que possible, et sont normalement adoptées par consensus, soit à l’échelon des ministres (lors de la Conférence ministérielle, qui se réunit au moins tous les deux ans), soit au niveau des délégués dans les commissions permanentes de l’OMC.

Les dispositions fondamentales de l’OMC, notamment, ne peuvent être modifiées qu’après leur approbation par tous les Membres (entrée en vigueur après ratification par chacun des membres selon les procédures nationales prévues par leur Constitution). L’OMC n’a pas d’organe exécutif indépendant doté de vastes pouvoirs. Contrairement aux institutions de Bretton Woods (par exemple le FMI), le Secrétariat de l’OMC n’est pas habilité à développer ses propres activités et à émettre des recommandations à l’intention de ses membres en matière de politique économique.

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Hommes d'Afrique Magazine

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